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Faute grave – À quel moment l’employeur doit-il initier la procédure de licenciement ?

By 14 avril 2022No Comments

Un salarié peut être licencié pour faute simple, faute grave ou faute lourde, au terme d’une procédure disciplinaire. Les conséquences du licenciement varient en fonction de la qualification retenue par l’employeur et de la procédure initiée.

  1. En principe, la procédure doit être rapidement initiée

La faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise même pendant la durée de son préavis ((Cass. Soc., 26 février 1991, n°88-44.908)). L’employeur doit donc apprécier le degré de gravité de la faute en prenant en compte notamment la possibilité pour le salarié d’effectuer un préavis au sein de l’entreprise.

En pratique, la proportionnalité du licenciement (et donc le degré de la faute retenue) s’apprécie également en prenant en compte l’ancienneté du salarié et son dossier disciplinaire.

Lorsque l’employeur a connaissance d’un fait fautif, il dispose d’un délai de deux mois (2 mois) pour initier une procédure de licenciement ((article L. 1332-4 du Code du travail)).

La jurisprudence est venue préciser que lorsque l’employeur entendait retenir une faute grave, il devait engagement la procédure de licenciement dans un délai restreint.

La durée du délai « restreint » dépend des vérifications que l’employeur doit effectuer ((Cass. Soc., 24 novembre 2010, n°09-40.928)).

En effet, rappelons qu’en matière de faute grave, la charge de la preuve incombe à l’employeur. Il est donc important que ce dernier s’assure de la véracité des griefs invoqués avant d’initier une procédure de licenciement. Cela vise les auditions de témoins, des vérifications diverses, une enquête interne etc…

Une fois ces vérifications effectuées, l’employeur pourra initier une procédure de licenciement et éventuellement mettre le salarié à pied à titre conservatoire pour continuer ses investigations ou en raison de l’impossibilité de le maintenir dans l’entreprise le temps de la procédure de licenciement.

2.Des exceptions à l’exigence d’un délai restreint

La jurisprudence est venue atténuer ce principe en admettant que le salarié pouvait être maintenu dans l’entreprise :

  • pendant l’accomplissement des formalités légales relatives à la procédure de licenciement ((Cass. Soc., 6 mars 1990, n°87-43.950)) ;
  • pendant une durée d’appréciation du degré de gravité des fautes commises ((Cass. Soc., 9 novembre 2004, n°02-45.628)) ;
  • lorsque le salarié est absent pendant une période de suspension de son contrat de travail ((Cass. Soc., 9 mars 2022, n°20-20.872)).

Dans ce dernier arrêt récemment rendu, la Cour de cassation a retenu que le déclenchement tardif de la procédure de licenciement ne pouvait pas avoir pour effet de retirer à la faute son degré de gravité dès lors que la salariée, dont le contrat de travail était suspendu, était absente de l’entreprise.

Il reviendra à l’employeur, en cas de litige, d’apporter la preuve des motifs l’ayant contraint à initier « tardivement » la procédure de licenciement pour faute grave.

3.Les sanctions en cas de licenciement tardif

Lorsque l’employeur n’agit pas rapidement pour sanctionner un salarié, ce dernier est bien-fondé à remettre en cause le degré de gravité retenu.

Rappelons que l’appréciation des griefs de licenciement relève du pouvoir souverain des juges du fond.

Ainsi, le bien-fondé du licenciement pourrait être remis en question s’il est jugé que le délai pour initier la procédure de licenciement est trop important.

Le licenciement serait alors jugé comme étant dénué de toute cause réelle et sérieuse.

Le salarié pourrait solliciter : une indemnité compensatrice de préavis, une indemnité de licenciement, une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (outre un éventuel rappel de salaire sur mise à pied abusive).